Acte 1 : Face Nord de l’Aiguille du midi. voie ferroviaire.
Cette belle ligne, caractérisée par un dièdre qui saute aux yeux a été ouverte en février 2000 par Andy Parkin et Adam Wrainwright. Ce fameux dièdre est bien visible depuis Chamonix et notamment depuis le parking du groupe, ou l’adjudant-chef Séb B. installe sa longue vue pour « mater les conditions ». Lorsqu’il propose d’aller grimper cette jolie voie, l’adjudant Arnaud B et le caporal Antoine B. sautent sur l’occasion.
Nous voilà donc partis le lundi 25 janvier avec la première benne jusqu’au plan de l’aiguille. Nous trimballons dans nos sacs, en plus des raquettes de neige pour tracer l’approche, un jeu et demi de Camalot jusqu’au n° 2, un jeu d’Alien et 6 broches (ndlr : au vu des conditions le Camalot n°3 aurait été le bienvenu !).
Pas de matériel de bivouac, encore moins de thermos… 3 barres de céréales et 1/2 l d’eau par personne.
Nous imaginons descendre avec la dernière benne de 16H30. Optimistes…
Des l’approche, nous nous relayons pour tracer dans une neige bien sucre… Il nous faut 2h pour atteindre le pied de la goulotte.
Nous attaquons par le petit couloir de glace raide (90°) indiqué par le topo. C’est un peu plus « dry tooling » ou « ancrages secs » comme dirait Andy.
Après le premier névé suspendu, nous remontons en corde tendu les dalles verglacées (70°). L’ambiance est démente et la progression rapide dans ces plaquages en neige « couic-couic ».
Au deuxième névé, notre peine et aussi notre capacité à rater la benne commencent à grandir. Les pentes de neige en sucre sont surement agréables pour les skieurs mais un peu moins pour les alpinistes aux courtes jambes arquées !
Quand Seb prend la tête pour les 3 longueurs clef du dièdre il est déjà bien tard.
La ligne blanche qu’il a repérée depuis le Groupe n’est pas la belle coulée de glace espérée mais plutôt de la poudre aux yeux qui masque les prises du rocher. Ancrages secs encore. Pas facile, pas rapides, nous prenons cependant un grand plaisir à grimper.
16h30. La dernière télécabine et donc notre sésame pour la vallée nous passent par dessus la tête.
Nous terminons en corde tendue les pentes en mixte facile qui mènent à l’arête NW puis à l’éperon Seigneur. Nous sortons au sommet de l’aiguille du midi juste avant la nuit, ce qui nous permet de prendre de jolies photos et de ne pas trop user les pilles des frontales … Une nuit pas top à encaisser mais nous avons connus de pires bivouacs !
Nous redescendons avec la première benne du lendemain. Le Commandant Jean-Yves I. nous accueille avec un café bien mérité. Une belle manière de conclure une superbe et longue journée en montagne.
Acte 2 : « Fast and light » aux courtes.
L’adjudant Seb M. reviens sur cette magnifique boucle :
« Qui peut bien m’appeler en pleine nuit à trois heures du matin ? Je tâtonne, trouve mon téléphone, répond…..personne. A oui ça me revient, C’est juste mon réveil. C’est tôt trois heures quand même. Un petit déjeuner plus tard je retrouve Séb sur le parking des Planards ou nous laissons une voiture pour la navette au retour. Nous nous étions donné rendez-vous à 3h45, il est 3h44. Charge à nous de garder cette avance pour respecter le timing que j’ai imposé. Mon impératif est d’être à la sortie de l’école dans moins de 12 heures. Avoir trainé en montagne ou eu de mauvaises conditions sont des arguments qu’un enfant de 4 ans ou son institutrice acceptent difficilement. Entre temps, nous envisageons de passer du bassin d’argentière à la mer de glace via la célèbre voie des suisses aux courtes. Le tout sans utiliser de remontées mécaniques. 3h59, notre avance est toujours là lorsque nous quittons le parking. A peine deux minutes plus tard, notre élan est stoppé net par un dameur qui descend de sa machine pour venir nous voir. En ces temps de tensions entre les skieurs de randonnée et les stations de ski nous prenons le parti d’éviter tant que possible de remonter les pistes, nous pensions le damage terminé à cette heure avancée. Nous parlementons et convenons d’un accord, longer la piste en dehors des jalons et ne pas gêner son travail. Nous montons donc rapidement à Lognan pour passer le moins de temps possible dans les parages sous la menace des câbles. Le rythme est donné.
A 7h45 nous effectuons la dernière conversion avant de nous accorder un quart d’heure au pied de la face. Nos skis passent sur le sac et les crampons sont chaussés. Les conditions de la montagne ne sont pas optimales en ce mois de janvier, l’expérience des autres, hier, nous laisse perplexe quant à la possibilité de trouver de bonnes conditions. Nous appréhendons la suite même si du bas la ligne parait bien dessinée.
8h00 : Dès les premiers mètres, nous reprenons confiance, la neige est polystyrène et la ligne est continue. Nous pouvons grimper très vite tout en protégeant suffisamment notre progression. A mi-parcours nous fêtons le changement de leader par une barre et un thé. Le haut de la montagne est à peine moins déroulant dans une neige pulvérulente alternant avec une vieille glace dure. A 10 heures nous touchons le sommet. Un petit vent nous incite à ne pas trainer.
La descente en « allumettes » (petit nom pour les skis ultralight) est un concentré de déplaisir. Selon l’épaisseur de la croute, soit on est au taquet sur les carres , soit on passe à travers. Passé ce mauvais moment nous retrouvons la trace familière de la vallée blanche qui nous amène à notre point de départ. Largement en avance sur les prévisions. »
Acte 3 : « Voyage » en Ecosse.
Cop21 et restrictions budgétaires obligent, nous n’irons pas au Ben Nevis cet hiver ! Mais ça tombe plutôt bien, il existe une mini Ecosse à 2 pas et 3 télécabines de la maison : La rive gauche inférieur du glacier d’Argentière ! Pas un piton, pas une cordelette et encore moins de spits en place dans ce secteur. « L’aventure à 50m des pistes de ski » dixit Jeff Mercier. C’est bien vrai !!
30 minutes d’approche en peau de phoque ou même à pied depuis la gare de Lognan, ou encore par « ski de gravité » depuis le télésiège de la herse… Quelques rappels et nous voilà au pied du mur.
Le Capitaine Didier J. et le caporal Max B. rendent visite au secteur « Blade stadium » mardi 26 et mercredi 27 janvier. Ils grimpent a cette occasion les voies « Nightmare Rex (M7+) » accompagné par Pierre Labbre et le lendemain « Flama Libra (M6+) ».
Le Capitaine Didier J. se plait tellement dans cette rive gauche du glacier d’argentiere qu’il décide d’y retourner une troisième fois dans la semaine. Cette fois il visite le secteur « Highlands » et grimpe la voie « Bringing Home the Bacon (M6+) » en compagnie du caporal Antoine B.
La ligne remonte en 3 longueurs (M5/M5+/M6+) une fissure caractéristique. Nous sommes partis bien équipés avec 2 jeux complets de Alien/totem/Camalot du 000 au 3 et 1 jeu de cablés. Si nous avions eu 3 jeux nous les aurions utilisés !!
Les conditions de glace sont vraiment pas mal pour un mi avril ! La terre pas vraiment gelée et les petits blocs instables qui remplissent la fissure rendent l’expérience encore plus formatrice… mais ça passe.
Il nous faut quand même 5h pour 120m d’escalade !!
Nous rechaussons les skis à la grille ou nous sommes descendus en rappels. Nous nous laissons glisser jusqu’à Argentière avec l’impression d’avoir vécu une belle aventure écossaise.
Le meilleure topo internet reste le blog de Jeff Mercier qui a bien trainé ses crampons dans le secteur : http://jeffmercier.blogspot.fr/p/blade-stadium.html
Acte 4 : « Mixte » à la Herse.
Pour finir la semaine en beauté, les adjudants Seb M. et Arnaud B. se rendent à la Herse.
Quand les glaciéristes empruntent le télésiège de la Herse c’est pour foncer skis aux pieds vers la rive gauche du glacier d’argentière. C’est l’accès de faignant par excellence puisqu’il permet de s’affranchir des peaux de phoque. Concentrés à être les premiers, biens peu levent le nez sur les barres qui jouxtent ce célèbre hors-piste. Quand bien même l’idée leurs viendrait de s’attarder sur ces rochers, le hurlement du rider immortalisant son run sur sa gopro, le vrombissement des ratracks et le ronron du télésiège n’encourage pas à s’attarder ici. Pourtant cette arête offre de nombreuses possibilités et quelques connaisseurs sont allés user leurs lames dans les contreforts de l’arête des rachasses. Une fois quitté le confortable six places débrayable une petite ligne saute aux yeux et ce sera notre choix du jour.
La qualité du rocher n’est pas la qualité première des premiers mètres. Comme partout, le retrait glaciaire a laissé des cicatrices. De là à faire demi-tour il y a un fossé car la suite est plus alléchante. Une seconde longueur nous redonne le sourire. Plus raide, juste ce qu’il faut de prises de pieds et de fissures à coincement. Les derniers trois mètres en léger devers avec un rétablissement sur des touffes d’herbes gelées finissent de nous convaincre. La suite réserve aussi ses bonnes surprises avec un rocher de qualité et même de la vraie glace de goulotte.
C’est certain l’arête des rachasses ne détrônera pas les itinéraires d’ampleur du massif. On y vient avant tout pour sa facilité d’accès ou pour occuper une journée de temps moyen. Mais ces aprioris ne doivent pas évincer les possibilités qu’offrent ce secteur dans des niveaux et des styles très différent. Pensez-y La prochaine fois que vous butterez devant une benne des grands Montets fermée.