Peux-tu te présenter rapidement ?
Ok mais normalement, c’est moi qui pose les questions ! Si pour le live des Drus je suis un peu rentré dans l’histoire, ma place est plutôt derrière la caméra, ne l’oublions pas.
J’ai fait des études de conception mécanique mais, passionné de sport nature et d’image, j’ai la chance, depuis une vingtaine d’années, d’en avoir fait mon métier actuel au sein du ministère des Armées. Je suis civil, responsable multimédia à l’Ecole militaire de haute montagne (EMHM) de Chamonix.
Depuis combien de temps travailles-tu avec le Groupe ?
J’ai été recruté à l’EMHM, il y a une dizaine d’années, pour concevoir des médias pour plusieurs entités de l’école. Ce sont des livres, des sites internets, des photos et des vidéos à caractère pédagogique ou liées à la communication. Le Groupe n’est donc qu’un de mes “clients”.
Comment ça se passe ?
Si je dis “en symbiose”, c’est crédible ? Le Groupe est constitué d’athlètes de haut niveau qui côtoient des personnalités dans le domaine de la montagne et des médias. J’ai donc dû faire mes preuves avant que l’on me donne l’opportunité de travailler sur des sujets d’ampleur. C’est compliqué, quand on œuvre dans une administration, d’être en concurrence avec des réalisateurs extérieurs qui ont une liberté, une réactivité, du matériel dont on ne dispose pas. Mais au fil des projets, j’ai accumulé de l’expérience et, au vue du nombre de fois où le Groupe me sollicite, elle doit être profitable ! Nous avons maintenant une très bonne complémentarité qui permet d’envisager des projets de plus en plus ambitieux.
Comment faire pour rendre dynamique et regardable une activité profondément ancrée dans la lenteur ?
Facile, si l’on dispose de beaucoup d’images différentes, de prêt de loin, de dessus, de côté, d’un mouvement puis d’un autre, il suffit de mettre une musique rythmée et le tour est joué. Les films qui arrivent à ce rendu, ont triché en retournant des prises ou ont de gros moyens ! En alpinisme, et particulièrement lors d’ouvertures, on n’a généralement que quelques images de postérieurs prises par dessous. Le seul dynamisme provient du tremblement du cameraman qui, en plus d’assurer le leader, essaye de filmer. Les longues séquences avec une musique planante, ce n’est pas trop mon truc. Ce que je préfère, c’est trouver une histoire à raconter et tenter de lui donner du rythme.
Comment concilier originalité et image militaire ?
Entre langue de bois et gros délire, il y a une marge à exploiter, le pire étant l’autocensure. L’originalité n’a qu’un intérêt si elle sert le propos et permet que le spectateur reste jusqu’au bout. C’est particulièrement vrai sur les vidéos diffusées sur Internet. Travailler au profit d’une administration c’est finalement la même chose que réaliser des films pour des entreprises privées. On doit être attentif à l’image qui en ressort. Pour autant, rien n’empêche d’être drôle, sympathique ou émouvant. Ne pas oublier que le spectateur est, dans l’ensemble, intelligent et qu’il va comprendre le second degré.
D’où t’es venu l’idée du Live ? Depuis quand ?
J’y pense depuis le jour où j’ai cru que c’était faisable. C’était il y a 5 ou 6 ans et pas certain que dans mon rêve j’avais toutes les solutions. Avant d’être un raconteur d’histoire, je suis un technicien. J’aime bidouiller et inventer. Le Live, c’est ce qui réunit le maximum de ce que j’aime faire : Des images à capter, des fils à brancher, de l’informatique à torturer, des idées à trouver pour que tout fonctionne. Tu mets ça tout ensemble, tu rajoutes la montagne et l’escalade, une de mes activités préférées, puis tu assaisonnes avec le piment du direct. Comme un soufflé, ça a beaucoup de chance de rater, mais que c’est bon quand ça marche !
Comment ça s’est fait ?
Ce qui a été cool avec ce projet, c’est qu’il y avait tellement peu de chance que tout fonctionne que je n’avais aucune pression. Ça a été décidé à la dernière minute et on n’a pas eu le temps de le préparer. Léo m’a appelé alors que j’étais en vacances. Je suis passé chez moi, j’ai rempli des caisses de matériel et deux jours après j’étais dans la gare du Montenvers, seul avec mes caméras et mes ordinateurs. Je ne savais même pas si j’aurais une liaison Internet.
Es-tu content du résultat ?
Mes collègues savent que je ne suis jamais complètement content des résultats. Dans mon domaine, on peut toujours améliorer les choses. Si on n’a pas cette volonté, on ne peut pas avancer. Donc, je suis très content d’avoir vécu cette aventure, avec le super état d’esprit qu’il y a eu avec le Groupe. Quand je jette un oeil sur ce qui a été fait, je vois plein de choses qui sont mauvaises, mais quand je me souviens de comment nous les avons faites, je me dis qu’on ne s’est pas si mal débrouillé.
A refaire ? Ou as- tu de nouvelles idées ?
Clairement, j’aimerais le refaire mais avec plus de préparation. Cela nous permettrait une meilleure qualité et surtout, une plus grosse audience. Mais il faut trouver le lieu, la ligne, les grimpeurs,… Ce type de projet réunit beaucoup de contraintes ! Des idées j’en ai plein, mais chut. C’est comme pour l’ouverture d’une voie d’escalade, on n’aime pas trouver les clous de ceux qui ont eu la même idée.
Quels vidéos du GMHM tu conseillerais ?
Le Groupe fait des films depuis sa création, c’est dommage qu’ils ne soient pas toujours bien connus et reconnus. Le premier en 1978, “Le pilier du ciel”, m’épate car il est plein d’images qui ont dû être compliquées à tourner, même si c’est une mise en scène d’un autre temps. Le meilleur de tous les temps est certainement “Sur le fil de Darwin” mais pour des raisons de droits, il n’est pas facile à voir. Je suis plutôt fier du “Changabang et les miroirs d’une répétition”, si ce n’est pas le meilleur du Groupe, c’est le meilleur que j’ai réalisé. Jusqu’à présent…